Dimanche 22 avril 2001

Santorin

Ancienne Thera

Auberge Alexandra

Le téménos d'Artemidoros

Le serment des fondateurs

Ferry "El greco"

Hotel Galaxy


Nous montons vers l'ancienne Thera. Un minibus nous dépose par groupes sur les hauteurs du site antique. Un temps superbe succède à la grisaille de la veille. Nous sommes perchés sur une croupe rocheuse à une altitude de 350 mètres. Le site archéologique est un espace long, étroit, traversé par une rue principale bordée d'amas de ruines.

Les fouilles ont été menées, dès le début du XXème siècle, par l'archéologue allemand Gartingen. Elles ont mis à jour la ville du roi légendaire Thera.

À l'entrée de la ville antique, se niche la petite église byzantine de San Stefanos construite sur les vestiges d'une chapelle dédiée à Saint Michel, comme nous l'apprend une stèle de marbre placée sur le mur gauche. L'intérieur sombre et mystérieux attire quelques-uns d'entre nous. L'iconostase nous touche par son émouvante simplicité.

Puis nous suivons la route antique et rencontrons bientôt le téménos d'Artemidoros, amiral de la flotte de Ptolémée. Ce téménos, sanctuaire du domaine, retient notre attention par ses figures sculptées. Bien ciselés dans la pierre, ressortent les animaux sacrés : l'aiglon des Ptolémée, le dauphin de Poséidon et le lion d'Apollon. Au dessus, on distingue le profil sculpté d'Artemidoros.

Nous poursuivons notre marche baignés de vent et de lumière, dans l'air léger que nous humons, grisés par le parfum des plantes sauvages envahissantes. Les yeux se portent au loin, sur la mer émeraude piquée d'îlots. Le spectacle est magique vu de la ville-forteresse érigée sur cet éperon rocheux.

"…, j'irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l'herbe menue :
Rêveur, j'en sentirai la fraîcheur à mes pieds,
Je laisserai le vent baigner ma tête nue !
Je ne parlerai pas, je ne penserai rien.
Mais l'amour infini me montera dans l'âme …"

Ces quelques vers d'Arthur RIMBAUD chahutent dans ma tête. L'envie me tient de rester là, sans bouger, seulement être, respirer, sentir, aimer. Cette sensation d'euphorie douce m'accompagnera tout au long de notre promenade.

Le serment des fondateurs :

Non loin du téménos, sur l'agora, adossées contre un mur de pierres empilées, accolées l'une à l'autre, deux stèles gravées reposant sur des colonnes tronquées, font l'objet d'un commentaire de l'un des nôtres : François Vannier.


Vestiges du temple archaïque d'Apollon sur le chemin qui monte. En surplomb, un espace. Ce balcon sur la mer était un lieu consacré aux danses rituelles. Andreas évoque les Doriens de Thera, le culte d'Apollon Karneia. Il nous entraîne à la suite des éphébes. Leurs pas foulent encore le gymnase où nous mettons les nôtres. Les nuits de pleine lune ils dansaient, enivrés, en l'honneur de leur dieu. Pendant quelques instants nous les verrons tracer des arabesques, mener des farandoles, exprimer leur extase ; ils dessinent des courbes, offrent leurs corps parfaits à la beauté ambiante.

Il faut redescendre sur terre, longer la rue pavée, arpenter les vestiges des temples et des villas, traverser l'Agora, repérer le portique d'un édifice romain, les traces d'un théâtre…

Auberge Alexandra à Kamari, pause déjeuner. Un cep de vigne, en corbeille selon le mode local de culture de la vigne, décore l'un des murs de l'auberge.

Il est 16 heures. Notre court séjour sur l'île de Santorin touche à sa fin. Nous rejoignons le port principal de l'île, Athinios, à peine entrevu la nuit de notre arrivée. Ses quelques maisons sont taillées dans le roc volcanique. Il paraît petit, étriqué, écrasé par la masse qui le surplombe et comme noyé sous la nappe bleue prête à s'étendre sur son rivage.

Pour l'instant, la mer est vide, le Ferry "El Greco" n'est pas au rendez-vous. Nous l'attendrons longtemps, pendus à nos bagages, quelque peu désœuvrés, affalés autour d'un verre, ou pressés dans une sorte de remise pour voyageurs avant l'embarquement. Il fait presque froid, le vent souffle. Cheveux hirsutes, figures crispées, nous avons des allures d'émigrants. La tension monte jusqu'à l'arrivée du ferry.

Retour dans l'antre de la baleine, cette fois secouée de soubresauts de fort mauvais augure. Quelques odeurs de fioul nauséabond mettent déjà l'estomac au bord des lèvres. Je serai malade, je le sais, je me le dis. Promesse, hélas tenue ! Moi avec quelques autres nous subirons les avanies d'un violent mal de mer qui brouille la vue et le langage et vous rend toute chose détestable. Longue traversée cahotante. Quatre heures plus tard, le supplice prend fin. Quel soulagement intense de poser les deux pieds sur la terre ferme. Soudain rien ne paraît plus beau, plus sain, plus prometteur que le quai ordinaire du port d'Héraklion, havre de paix après cette quasi tempête nauséeuse.

Nous gagnons l'hôtel Galaxy, retrouvons l'appétit, le rire et l'envie de dormir dans un bon lit douillet.



Approfondissement :

L'Université de Bourgogne s'est doté d'un serveur consacré à l'histoire ancienne : Stimulus, plusieurs pages s'intéressent à Santorin, "une pompéi préhistorique". Elle semble réaliser la synthèse des recherches actuelles.


©cviviani